Un mois à Lobitos

Après bientôt quatre semaines passés dans le petit village de Lobitos, il devient difficile de savoir par où commencer cet article. Pourquoi être restés aussi longtemps dans cet ancien village anglais? Je vais essayer de vous l’expliquer dans les prochaines lignes. 

Nous sommes partis de Huanchaco pour remonter la côte jusqu’à Lobitos assez rapidement car nous voulions passer du temps avec notre copine Ale (parce que quand même, retrouver les potes sur la route, c’est une bonne excuse pour « zapper » quelques destinations). Ale passait trois semaines de vacances ici pour gérer un petit événement local sur 14 jours, l’Agua y Mujeres. Il s’agissait d’une organisation de divers ateliers, uniquement réservés aux filles du village, avec au programme cours de surf, workshops de photographie, montage vidéo et travail sur le développement durable. Une jolie aventure dont on a eu le plaisir de suivre de loin. 

En arrivant à Lobitos, nous sommes un peu interpellés par les paysages que nous découvrons. Entre les puits de pétrole et les maisons abandonnées, on se croirait au milieu des décors d’un vieux western. Pour comprendre cette ambiance un peu atypique, décryptons l’histoire de ce pueblo pas comme les autres: 

Avant le début du XXe siècle, Lobitos était un petit village de pêcheurs. Puis, dans les années 1900, découvrant sa grande richesse d’or noir, les anglais s’y établirent et fondèrent une industrie pétrolière, la Lobitos Oilfield Compagny . De là, des maisons au style très « British » sortirent de terre, une église anglaise fut bâtie, ainsi que le tout premier cinéma d’Amérique du Sud (#funfact). Le petit village de pêcheurs se transforma petit à petit en une colonie anglaise où les locaux étaient même bannis de certains quartiers. En 1968, avec un nouveau gouvernement en place, la Lobitos Oilfield Compagny fut forcée de quitter l’endroit, et les troupes militaires péruviennes s’approprièrent les anciennes maisons des anglais. L’occupation militaire ne durera pas très long à Lobitos, et les pilleurs de tout horizon ont profité de ce « No Mans Land » pour tout détruire sur leur passage. Aujourd’hui, il ne reste du cinema que quatre petits murs d’un mètre de haut. 

Mise à part son histoire un peu sombre, Lobitos nous met en joie, car ici, le ciel est bleu, le sable est chaud, et surtout, l’eau ne semble pas sortir tout droit des canalisations. Il ne nous en faut pas plus pour nous réjouir rapidement.

Nous passons donc nos deux premières semaines ici à nous familiariser avec l’endroit (dans l’eau et à l’extérieur). Nos journées sont rythmées par trois choses: dormir, surfer et manger. Et quoi que peuvent en penser certains, ça fait déjà pas mal! Bon, ok, peut-être que dormir n’est pas la chose la plus difficile de notre planning: le Mangata Hostel est parfait, avec en prime, vue directe sur le spot de surf. Quoi de mieux pour prendre la décision fatidique d’aller surfer ou non, à six heures du matin. En plus de ça, Elioud, notre hôte, nous prépare des petit-déjeuners de roi: pancakes et œufs brouillés, on est trop gâté. En ce qui concerne les autres repas, les choix sont limités: ici, pas de joli marché regorgeant de légumes frais. Si l’envie nous prenait d’utiliser la cuisine, il faudrait aller jusqu’à Talara en collectivo (petit van qui part en ville si les dix sièges sont remplis), se balader là-bas, et revenir, trois heures plus tard avec nos courses de la semaine. Soit, beaucoup trop à ajouter dans nos plannings de ministres (aha!). Du coup, on fait des tournus entre les différents restaurants (c’est à dire quatre?) selon nos envies. Plutôt pescado à la plancha y arroz? Chez Tranqui. Envie de cuisine typiquement péruvienne avec ceviche, patacones y saltado de pescado? Chez Cora. Pizza? Pâtes? Chez Tito au 4:20. Et le luxe du luxe: hamburger végétarien ou salade de quinoa? C’est au Cuartel que ça se passe. 

Et le surf alors? Car c’est quand même notre occupation favorite de ce voyage (après la nourriture, on est d’accord). A Lobitos, on trouve plusieurs spots répartis le long de la côte, qui marchent différemment en fonction des saisons et des directions de swell. Ces dernières semaines, c’est surtout à La Punta que nous nous sommes éclatés. Il s’agit d’un point break accessible à tous, offrant des jolies gauches. Ici, pas de courant, et surtout du sable en fond qui nous donne une grande sécurité pour progresser sans crainte. Toujours pas mal de monde à l’eau, une ambiance au lineup peu accueillante les premiers jours, qui, au fil des semaines, devient plus détendue grâce à nos sourires tenaces. Seb a aussi eu l’occasion de tester Piscinas: jolie gauche déferlant sur du sable aussi, un peu moins crowded que la Punta car accès plus limité (jolie marche de 30 minutes sur la plage pour remplacer l’échauffement). 

Voilà plus ou moins le résumé de nos deux premières semaines à Lobitos, avec en plus, en petit tour sur la barque de Tullio, un cours de cuisine aux enfants du village et un weekend à Los Organos avec les copines de voyage pour faire un coucou aux baleines et aux dauphins.

Et puis il y a eu ce petit « imprévu » au programme: une fièvre de 40 degrés, accompagnée par tous les maux intestinaux imaginables pour moi. Heureusement, j’étais accompagnée par deux anges gardien de compétition: Seb qui a géré comme un chef la compresse fraîche (ou l’utilité de la chaussette en surf trip), et Silivia, l’infirmière de Lobitos, qui a apporté la seringue d’antibiotiques salvatrice. 

Cette mésaventure nous a donc obligé de prolonger notre séjour ici, afin que je puisse me remettre de mes émotions. Et nous voilà, quasi quatre semaines plus tard après notre arrivée à Lobitos: nous nous levons toujours à six heures du matin pour checker les vagues, nous nous réjouissons toujours autant des pancakes d’Elioud, mais surtout, nous avons appris à aimer cet endroit, qui, malgré les apparences, regorge de plein de surprises et de beauté à l’état brut.